novembre 15th, 2019

2019, un millésime « Game of Thrones », fait de glace et de feu

On aime toujours comparer les millésimes entre eux, et pourtant cette année cela va être difficile tant les conditions climatiques furent particulières :

1. Une descente d’air glacial le 5 avril ayant fait des dégâts dans les bas-fonds de certaines parcelles
2. Un début mai froid et couvert générant une grosse coulure sur grenache
3. Une sécheresse à croire que le Sahara avait traversé la Méditerranée : 170 mm de pluie sur les 10 premiers mois de l’année
4. Des températures estivales confirmant que le Sahara avait bien traversé la mer…
   • 45° à l’ombre le 28 juin enregistré dans nos vignes.
   • 73 jours > 30°
   • 22 jours > 35°
   • 28 nuits > 20°
5. Des incendies successifs début août, détruisant d’entières zones boisées sur la costière sud et faisant craindre des pollutions du raisin par la fumée

J’avoue que nous craignions le pire… mais nous nous en sortons bien avec une récolte un peu plus petite que l’an dernier (-10%) mais de très belle qualité, preuve de la résilience de la vigne et de l’adéquation de notre terroir pour elle.

Nous avons démarré les vendanges le 24 août avec les Viognier de Bek avant d’enchaîner avec les autres blancs et les rosés. Cette année pas de phase d’observation, les équipes de cueillette et de cave furent tout de suite à bloc, car il nous semblait important de ramasser avant que les belles acidités naturelles ne plongent et les degrés potentiels ne flambent. Nous ne nous attendions pas à autant de fraîcheur aromatique et d’acidité compte tenu de la climatologie de l’été. C’est la première bonne nouvelle du millésime : Les blancs et rosés sont tendus et éclatants.

Les rouges ont demandé plus de temps pour mûrir. Même si les richesses en sucre étaient déjà élevées, les peaux étaient végétales et amères et les pépins pas complètement matures.

Les Syrahs furent rentrées du 16 au 21 septembre dans une maturité aboutie. Fruit puissant et mûr, couleurs intenses et profondes et une matière charnue.

Pour les autres cépages noirs (Grenache, Carignan, Mourvèdre), nous décidions d’une pause d’une semaine après la pluie du 22 septembre (11mm) et reprenions les vendanges le 30 septembre pour finir le 5 octobre avec les derniers Mourvèdres. L’équipe avait vraiment besoin de souffler après plus de 3 semaines très intenses et de reprendre des forces avant la dernière longueur.

Ces cépages tardifs font eux aussi preuve de couleurs très profondes, de fruits mûrs très puissants et de beaucoup de matière. Certains sont toujours sous marc, mais il nous semble que le millésime nous donnera des beaux vins de garde avec un profil méditerranéen très prononcé.

La signature qui se dégage pour les rouges est une combinaison de richesse et finesse, avec beaucoup de tanins très fins qui donnent des milieux de bouche pleins et soyeux et sans accroche tannique sur les finales. Le fruit est mûr sans être confituré et l’équilibre est frais et sans lourdeur. Le travail en cave sans SO2 et en levure indigène a une fois de plus bien fonctionné, donnant une pureté de fruit et une complexité impressionnante. Le travail des marcs en infusion plutôt qu’en extraction a contribué à la finesse des vins. Enfin nous restons persuadés que l’équilibre des vins se fait à la vigne et cette année une fois de plus, le travail des sols et l’approche biologique nous a permis dans une climatologie extrême, des résultats remarquables.

Bien-sûr le travail n’est pas fini et il reste des décuvages, la fermentation malolactique, l’élevage et les assemblages mais toute l’équipe est enthousiaste quant à la matière première dont nous disposons.